Ferenczi : L’injection psychique (1932 !)

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“Depuis qu’elle a entendu parler de la théorie de Freud sur le Surmoi en tant que produit de clivage du Soi, elle répète avec une grande conviction que dans son cas un Surmoi féroce, la volonté de sa mère, l’enchaîne par une grande angoisse et la force à des conduites auto-destructrices. (Elle sent même que sa tendance à grossir de façon non désirée est l’œuvre de cette volonté étrangère qui lui est imposée et se dépose aussi physiquement sur elle.)

Elle se représente l’irruption du Surmoi nuisible (volonté étran­gère) à peu près de la façon suivante : la douleur et l’effroi paralysent les forces de cohésion et de survie de la personne, et c’est dans ce « tissu devenu mou et sans résistance » que la volonté étrangère, portée par la haine et le plaisir d’agresser l’autre personne, pénètre avec toutes ses tendances, tandis qu’une partie de sa spontanéité propre est poussée hors de la personne.

Le résultat de ce processus est, d’une part, l’implantation dans l’âme de la victime de contenus psychiques dispensateurs de déplai­sir, provocateurs de douleur et de tension ; mais en même temps, l’agresseur aspire pour ainsi dire en lui une partie de la victime, à savoir la partie qui a été expulsée. D’où l’effet calmant de l’explosion de fureur chez le furieux lorsqu’il a réussi à causer une douleur à l’autre : une partie du poison sera implantée en une autre personne (dorénavant c’est cette personne qui aura à se battre contre les affects de déplaisir, ne serait-ce qu’à cause du traitement injuste) ; en même temps (et c’est ce qu’il y a de neuf dans ce que rapporte S.I.), l’agresseur annexe l’état de bonheur naïf, dépourvu d’angoisse et tranquille dans lequel la victime vivait jusque-là. En termes simples, cela pourrait s’exprimer à peu près de la façon suivante : on se trouve dans une situation de gêne et de douleur, on envie la paix de l’autre, disons quelqu’un de faible, un enfant, on donne en quelque sorte un coup de pied à un chien parce qu’on est déprimé. On obtient ainsi que l’autre aussi souffre, ce qui doit absolument atténuer ma douleur. D’autre part, j’annexe par cet acte l’état de bonheur antérieur.”

Sandor Ferenczi, Journal clinique, Ed Payot, [1932],1985, p. 130.

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